Ray Lema
Origine : Congo RDC
Il est des musiciens rares qu'il ne faut jamais perdre de vue. Du haut de ses trois quarts de siècle, Ray Lema poursuit avec fidélité son chemin aventureux sur les sentiers de la musique.
À propos
Du haut de ses trois quarts de siècle, Ray Lema poursuit avec fidélité son chemin aventureux sur les sentiers de la musique. Du classique au jazz, des rythmes traditionnels Kongo à ceux des Gnawas en passant par les chœurs Bulgares, le pianiste Ray Lema est le plus expérimentateur des musiciens d'origine africaine et a décidé de faire transpirer tous ceux qui aiment ranger les musiques dans des cases. Il faut dire que, dès sa prime jeunesse, dans son Zaïre natal (ex-Congo), il faisait ses gammes sur Bach, Beethoven ou Mozart. II réinvente les rythmes afro-ethniques dans des formes de musique classique ou de jazz à venir. C'est aussi l'un des pères de la musique centrafricaine post-moderne, un pilier de la sono mondiale, une figure de la scène congolaise.
Né en 1946 et élevé dans une famille protestante, le garçon veut devenir prêtre catholique. On l’envoie donc au Petit Séminaire près de Kinshasa. C’est là que les pères blancs décèlent ses aptitudes musicales, l’orientent vers le piano et le désignent pour accompagner les messes à l’orgue. La formation est austère, mais solide.
Le Congo accède à l’indépendance et notre organiste a une certaine liberté de penser qui lui fait abandonner le séminaire pour suivre des cours de chimie à l’université. Mais sa flamme pour la science s’étiole et il plaque tout pour la musique. Avec l’orchestre de Gérard Kazembe, il reprend les airs en vogue en Europe et joue du rock avec les Yss Boys, passant pour un original dans cette ville, Kinshasa, où la rumba est reine et possède le monopole de l’ambiance. Mais c’est précisément parce qu’il est un ovni, formé aux rigueurs de Bach et à la composition classique, qu’on lui confie la direction musicale du Ballet National du Zaïre nouvellement créé. Sa mission: arpenter le pays pour y recruter des musiciens, des chanteurs et les faire jouer tous ensemble pour représenter le pays. Dans cet immense territoire qui n’est pas encore une nation, l’affaire est plus complexe qu’il n’y parait. Mais il y découvre l’incroyable diversité musicale de ses concitoyens et la science du rythme qui anime tout un chacun, puisque musique, chant et danse sont dans les villages l’affaire de tous. Cette recherche laissera en lui une profonde empreinte. Son renvoi du Ballet aussi, lorsqu’à la fin des années 70, il refuse de composer un opéra à la gloire de Mobutu, le “roi du Zaïre”. On lui retire alors maison, voiture, orchestre. C’est le moment que choisit la fondation Rockfeller pour lui proposer une bourse et le billet pour Washington qui va avec. Ray s’envole loin du Zaïre, sans savoir qu’il n’y remettra plus les pieds pendant plus de trente ans.
Au pays du jazz, il croise la route de Stewart Copeland, le batteur du groupe The Police qui l’aide à enregistrer son premier disque, Koteja. Mais la vie sur ce pays-continent qui ignore tout du reste du monde ne lui plaît guère. En 1980, il décide de plier bagages et s’envole pour Bruxelles, puis Paris à l’invitation de Jean-François Bizot, patron du magazine Actuel qui le parraine. Le savant pianiste n’attendait que ça : de nouvelles aventures.
Son premier disque, Kinshasa-Washington DC-Paris (1983), est un audacieux rappel de tous les sons qui l’ont fait jusqu’alors. Deux ans plus tard, il récidive avec Médecine, un album où il se livre, dans un studio transformé en labo, à toutes sortes d’assemblages : synthés, chœurs kongo, rythmiques funky, djembés, le savanturier convoque les forces de l’univers musical avec une foisonnante jubilation. Derrière son clavier, comme un tambourinaire, il continue de s’inspirer des rythmiciens rencontrés au Zaïre. Bandes originales de film (Black Mic Mac), band original éphémère (le Bwana Zoulou Gang) avec Higelin, Bashung, Dibango et Couture… En compagnie ou en solo, Ray Lema multiplie les creations sur scène comme sur disque. Il incarne à lui seul le concept de sono mondiale cher à Bizot, avant que les marketeurs ne le récupèrent pour en faire la world music. Le disque enregistré avec le Professeur Stefanov et ses choeurs bulgares, ou Safi avec les gnawas marocains du groupe Tyour en sont de parfaits exemples.
Le jazz, musique de croisements métissages, demeure l’un de ses meilleurs compagnons. En duo avec Joachim Kühn ou Laurent De Wilde, ou bien avec son quintet, il creuse là aussi son propre sillon, gravé dans la cire de nombreux albums. Du jazz, il défend d’ailleurs une conception « africaine », c’est à dire très collective, et cela se ressent dans le respect qu’il voue aux musiciens qui l’accompagnent. Et quand ils sont nombreux, c’est encore mieux ! A ce titre, rien n’enchante plus le compositeur que la collaboration avec les orchestres classiques. Depuis vingt ans, de la Suède au Brésil en passant par la Chine, il a le bonheur d’être invité par des ensembles qui jouent ses œuvres, en version symphonique !
Mais s’il a beaucoup voyagé et donné des concerts dans le monde entier, Ray Lema n’avait jamais remis les pieds au Zaïre, qui depuis son départ a connu une longue descente aux enfers, et retrouvé son nom de Congo. Pourtant, le pays ne l’a pas quitté. Au piano, il a conservé les astuces rythmiques congolaises, et le goût des sebene, cette phase typique de la rumba qui sert de moteur à la danse, et d’ascenseur pour la transe.
En 2012, la creation Station Congo lui en donne l’occasion. Il renoue, trente-trois ans plus tard, avec l’océan des rythmes de son pays. Ce retour aux sources, il le poursuit en consacrant un magnifique album, Nzimbu, au patrimoine de sa région d’origine (le Kongo central), et puis tout dernièrement (2019), en revenant à Kinshasa pour un hommage à Franco Luambo, patron de l’OK Jazz et monument de la rumba congolaise. Le temps d’un concert magique (disponible sur disque), l’ancien organiste du petit séminaire faisait revivre les grandes heures d’un artiste qui, plus que tout autre, s’était appuyé sur les musiques traditionnelles pour composer LA rumba qui fit danser toute l’Afrique. En un sens, la boucle était bouclée pour celui qui a toujours cherché à réconcilier son héritage congolais avec son éducation occidentale, et à les marier avec les autres cultures. Ray Lema est rentré à Paris comblé. Assis au piano, il travaille à sa prochaine aventure.
Projets associés
Line-up : Ray Lema, piano - Laurent de Wilde, piano
Après 4 ans passés sur les routes à jouer l'un avec l'autre, Ray Lema et Laurent de Wilde ont décidé de reprendre le chemin du studio pour y enregistrer un nouveau répertoire, né de leur complicité forgée au fil des concerts et des longues discussions.
Enregistré sur deux pianos Steinway assemblés à plus d'un siècle d'écart, leur répertoire d'œuvres originales enjambe non seulement le temps mais aussi l'espace, puisqu'on y retrouve des rythmes inspirés d'Éthiopie (Abyssinight), du Congo (Wheels, Lubablue), des Caraïbes (Poulet bicyclette, Saka Salsa), des États-Unis (I miss you Dad, Chains), du Nigeria (Human come first)...
Le jazz, la musique classique, la musique africaine se mélangent et se superposent au service d'un chant unique, celui de deux grands artistes passionnés par les rencontres entre les mondes. Les étincelles sonores qui en jaillissent ne cessent de les inspirer et cet album en est le nouveau témoignage, entier et sincère. La pulsation qui l'habite n'appartient qu'à eux, elle tourne sans relâche et infuse toute leur musique pour la rendre aussi unique qu'universelle.
Line-up : Ray Lema (claviers & voix), Fredy Massamba (voix), Ballou Canta (voix), Michel Alibo (basse), Dharil Esso (batterie), Irving Acao (sax ), Rodriguez Vanguama (guitare), Sylvain Gontard (trompette), Michael Joussein (trombone)
Un groove band irrésistible. Le pianiste Ray Lema est l’un des pères de la musique moderne centrafricaine.
Sur son dernier album il rend un hommage émouvant à Franco Luambo, icône de la rumba congolaise et fondateur du Tout Puissant OK JAZZ. Avec les huit musiciens de son groupe, il revisite ce répertoire tout en lui insufflant des sonorités contemporaines, notamment grâce à la batterie et à une section de cuivres flamboyante. Impossible de rester assis à l’écoute de ces morceaux au groove irrésistible !
Après l’uppercut On entre K.O, on sort O.K, son hommage à Franco, acclamé par la critique et plébiscité par le public à travers le globe, Ray Lema poursuit sa déclaration d’amour à la musique de son enfance, sa madeleine de Proust : la rumba congolaise.
L’ancien « ngembo » (chauve-souris en lingala) des « ngandas » (les bars musicaux) de Kinshasa revisitent les standards et les classiques des orchestres de légende de l’âge d’or de ce patrimoine immatériel de l’UNESCO: Franco Luambo, Tabu Ley, Franklin Bukaka, Docteur Nico, Wendo Kolosoi, Les Bantus de la Capitale, Franck Lassan, Les Grands Maquisards, Les Frères Soki de Bella Bella.
La rumba congolaise a intégré le patrimoine immatériel de l’humanité fin 2021 : le signe de l’importance de ce style musical dans l’histoire des musiques mondiales. Ses chants en lingala, ses guitares électriques et ses "rois de la SAPE” ont marqué le XXe siècle.
Une fois encore, le « savanturier » et son équipage remettent le couvert avec un leitmotiv : transmettre à la nouvelle génération, ce trésor musical inestimable qui vous mettra K.O.
Line-up : Ray Lema - piano, vocal / Michel Alibo - basse / Irving Acao - sax / Sylvain Gontard - trompette / Dharil Esso - batterie
Disque d'orfèvre, le jazz de Ray Lema nous sublime les frontières entre les genres, invoquant l'afrobeat nigérian, revisitant le Brésil de Jobim ou encore célébrant les noces du funk et de la samba. Un voyage musical éblouissant porté par des compagnons de route de haute volée.